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Nicolas Ancion - La cravate de Simenon | Текст песни

MON PÈRE

Quand j'étais gamin, nous n'avions pas la télévision à la maison. Pourtant, ma grand-mère et tous mes copains avaient la leur. Ils passaient les fins d'après-midi et les soirées devant les feuilletons et les films dont je ne voyais que de petits morceaux. Mais mon père détestait ça. Il préférait la lecture. Dans la maison, il y avait des étagères chargées de livres partout et des sièges confortables pour s'enfoncer avec un épais roman. C'était la fin des années 1970: les lampes étaient en plastique, les jupes courtes et les téléviseurs allumés tous les soirs. Sauf chez moi.

Un jour, alors que j'allais avoir douze ans, toute la famille était réunie à table pour le repas du soir, c'est-à-dire ma mère et moi, puis notre chien, Moustique, sans doute allongé près du four encore chaud. Mon père s'est levé de sa chaise et a déclaré, d'un ton solennel :

Magali mon cœur, Baudouin mon grand, j'ai une grande nouvelle à vous annoncer : demain, j'irai au magasin d'électroménager acheter un téléviseur.

Comme je le regardais, les yeux ronds comme des assiettes et la bouche ouverte, il a continué :

Oui, tu m'as bien entendu, Baudouin. Et tu peux m'accompagner, si tu veux.

Tous les poils de sa moustache semblaient dressés pour souligner l'importance de ses paroles. Je n'ai jamais su pourquoi il avait changé d'avis ce soir-là. Mais j'étais trop content de sa décision pour m'en tracasser. Il s'est rassis, a saisi cou­teau et fourchette pour achever, dans un silence bruyant, son poulet, sa compote de pommes et sa purée de pommes de terre. Et avec ça un bon demi-litre de bière brune.


Moi, j'avais la tête pleine de dessins animés et de films de guerre. De concours télévisés et de jeux vidéo. Je jouais souvent chez un copain. Peut-être qu'un jour, moi aussi, j'aurais droit à ma console. Nous avons achevé le poulet - je n'ai rien goûté du tout, j'avalais la nourriture sans y faire attention, ma tête était ailleurs - puis ma mère a coupé une pomme et nous l'avons partagée. Après le repas, j'ai filé dans ma chambre, jouer avec mes cow-boys en plastique les scènes d'un film imaginaire.

Le lendemain, mon père installait la télévi­sion dans le salon, face au grand canapé en faux cuir beige. Il n'y avait pas besoin de l'allumer, rien que sa présence suffisait à me rassurer : notre famille venait d'entrer, enfin, dans la modernité.

Nous avons regardé les informations tous les trois. L'image était en noir et blanc et le pré­sentateur apparaissait deux fois côte à côte mais nous avions l'impression d'assister à un miracle.

Je me souviens de ce moment comme si c'était hier. Nos trois corps un peu raides dans le canapé, serrés les uns contre les autres, moi entre mon père et ma mère : un instant surgi du passé, qui refuse d'y retourner parce qu'il me fait du bien.



*

Mon père n'était pas grand. Il mettait chaque matin une de ses chemises bleu clair que je voyais ma mère repasser en fin d'après-midi, quand la soupe réduisait sur le feu. Il portait des lunettes à montures épaisses, légèrement fumées, et des pantalons en matière synthétique, un peu larges dans le bas, étroits aux hanches. Au-dessus de tout cela, il affichait des cheveux trop longs au goût de ma grand-mère et une épaisse moustache châtain. Il aurait très bien pu être dans l'une de ces séries améri

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